" Économies, management : la chaudière double effet ! "
Nathalie et Jean-Daniel Kammerer ont investi 1,5 million d'euros dans la « Rolls » des chaudières à bois. Résultat : une facture de chauffage divisée par six, soit 240 000 euros d'économie par an par rapport à la consommation de gaz de ville. La démarche est validée par la mise en oeuvre de la norme 50001.
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Tout fraîchement mise en service, la chaudière autrichienne de marque AGRO, d'une puissance de 2 mégawatts des Ets Kammerer consomme en pleine puissance 3 m3/h de bois, soit un camion de 72 m3 par jour. Un de ses atouts est de se satisfaire de bois tout venant, du déchet grossier non séché de scierie en l'occurrence. L'approvisionnement provient d'une scierie située à 15 km de l'exploitation horticole, qui livre trois fois par semaine et pourrait le faire tous les jours si besoin. Avant cette installation, cette scierie livrait tous ses déchets en Allemagne ; ce partenariat bénéficie donc aux deux parties. Une aire extérieure accueille les livraisons de bois, sa surfaceest prévue pour stocker le combustible nécessaire pour une semaine.
Réaliser des économies d'énergie avec le bois. Il est acheminé dans le brûleur en permanence. La gestion de la combustion se fait par la régulation d'un double flux d'air, primaire et secondaire, et par une grille intérieure en escalier. La chaudière peut passer de 20 à 100 % de chaleur en très peu de temps. Le réseau primaire d'eau est toujours chaud, ce sont les vannes dans les serres qui régulent la température selon les consignes. Près de 700 m de réseau de tuyaux enterrés alimentent les serres avec une eau à 94 °C. La gestion de la chaudière est informatisée et régulée en permanence. Les cendres sont récupérées. La cheminée est équipée d'une double filtration et d'un électrofiltre, ce qui retient 99 % des particules fines des fumées, par un phénomène d'électricité statique.
Plus d'un hectare de serres nouvelles. L'installation de la chaudière à bois s'est doublée de la construction d'une nouvelle serre de 11 000 m2, afin de rassembler toute la production sur un même site. L'ensemble représente un investissement de 3 millions d'euros. « Ce projet se finance grâce à l'économie réalisée sur la matière première, explique Jean-Daniel Kammerer. De plus, nous avons bénéficié de subventions du conseil régional d'Alsace et de FranceAgriMer, ainsi que de l'apport des certificats d'économie d'énergie. L'entreprise a apporté 1 million d'euros en fonds propres. C'est évidemment un investissement possible pour une grande structure », reconnaît-il.
Très incitatif, le dispositif des certificats d'économie d'énergie (C2E, voir l'encadré ci-dessous) a permis de signer un contrat avec Total, pour le rachat des C2E de l'exploitation. Le montant de cet achat était doublé (jusqu'à fin 2014) dans le cadre d'une certification ISO 50001 liée à l'installation d'une chaudière biomasse, ce qui a encouragé l'entreprise à s'engager dans la démarche de certification. Le bureau d'études thermiques Agrithermic a réalisé l'étude de faisabilité et a proposé le projet à plusieurs obligés (émetteurs de carbone qui peuvent racheter des droits à polluer). Le choix d'un obligé tient compte des délais de paiement et du tarif d'achat des C2E. Ensuite le bureau d'études a aidé à élaborer la certification 50001.
Mettre en place les bonnes procédures. Cet investissement a incité la société à valoriser son travail d'économie d'énergie au travers de la norme ISO 50001 qui certifie des systèmes de management de l'énergie. Cette démarche de certification permet de réfléchir à des stratégies de management qui offrent d'accroître l'efficacité, de réduire les coûts et d'améliorer la performance. « C'est une question de civisme et d'économie, commente Jean-Daniel Kammerer. Il s'agit d'une prise de conscience, au quotidien, de tous les impacts énergétiques. Et c'est aussi une histoire d'hommes et d'engagement. »
Nathalie Kammerer renchérit : « Les quarante personnes du groupe sont investies dans la démarche et se sentent concernées. La méthode à suivre devient une habitude pour tout le monde. Il est devenu impératif d'être à jour dans tous les contrats d'entretien, nous contrôlons une addition de petites choses, qui fluidifient le quotidien et permettent d'économiser l'énergie. » Par exemple, les portes entre les différents compartiments de serres font l'objet d'un suivi précis d'entretien. Les interrupteurs, les machines, l'extinction des lumières dans les lieux non utilisés, sont autant de points de vigilance. Le suivi des températures permet de faire la chasse aux consommations supplémentaires cachées. Dans un hall de travail la consigne de température est de 12 °C. Le suivi fait apparaître qu'elle est toujours au-dessus de 15 °C grâce à une isolation efficace. Ce constat a permis de réaffecter à un autre lieu les matériels de chauffage présents dans le hall en question. Sur les 30 000 m2 de serres, la température a été abaissée de 2 °C, ce qui correspondait à une économie de 10 % sur la facture du gaz. L'ensemble des procédures de certification concerne aussi bien les surfaces en production que les 2 000 m2 de jardinerie.
Des pense-bêtes près des interrupteurs. « Nous organisons des réunions avec l'ensemble du personnel pour échanger sur les mises en oeuvre, améliorer le système et partager des informations, explique Nathalie Kammerer. Chacun peut faire part des dysfonctionnements constatés, en remplissant une fiche et éventuellement en proposant une solution. Par ailleurs, le suivi de tout le matériel permet de programmer les étapes d'entretien ou les réparations. C'est intéressant comptablement de connaître à l'avance les dépenses à réaliser. » L'engagement, pour être durable, doit être rappelé régulièrement. Par exemple, des informations sont données sur les feuilles de paie, des affiches sont positionnées dans l'exploitation, des pense-bêtes figurent à côté des interrupteurs, etc. « C'est rentré dans les habitudes des salariés, remarque Nathalie Kammerer. D'ailleurs, ils sont fiers de travailler pour une société certifiée. Il faut cependant faire vivre cette certification, qui participe à la construction d'une identité d'entreprise. Cette démarche a été l'occasion de développer une nouvelle dynamique, de ressouder les équipes et de moderniser le fonctionnement. »
Dans le domaine commercial, Jean-Daniel Kammerer envisage de communiquer auprès des clients : « Les acheteurs veulent mettre en avant les certifications françaises. Nous devons informer le consommateur final de tout ce qui est mis en place au bénéfice des économies d'énergie et donc du climat. L'entrée dans la certification Plante Bleue était prévue pour l'année dernière, mais cela a été retardé par l'engagement dans l'ISO 50001. » « Quand nous nous sommes investis dans la démarche, au mois de juin 2014, j'avais le sentiment que cette certification était réservée aux grandes sociétés, reconnaît Jean-Daniel Kammerer. Six mois après, nous étions certifiés. Nous nous sommes pris au jeu, l'exploitation gagne en efficacité sur tout, c'est gratifiant pour tout le monde. Maintenant, notre objectif est de le faire savoir. Nous le notons sur nos factures, nos fournisseurs sont mis au courant. Nous tenons nos engagements et nous pensons que nous agissons pour l'avenir. »
Cécile Claveirole
L'approvisionnement provient d'une scierie située à 15 kilomètres de l'exploitation horticole, qui livre trois fois par semaine.
La chaudière autrichienne de marque AGRO, avec une puissance de 2 mégawatts, consomme en pleine puissance 3m3/h de bois.
Une culture de poinsettias a été installée dans la toute nouvelle serre de production de 11 000 m2.
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